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Centre Pompidou, Musée national d'art moderne / Centre de création industrielle

Martin Szekely - Ne plus dessiner


Commissaire : Mnam/Cci, F. Guichon

« Ne plus dessiner ». En 1996, Martin Szekely déclare vouloir désormais placer son travail sous l’égide de cette règle. Si cette déclaration peut sembler provocante chez un « designer » consacré comme tel en 1983 alors même qu’il signe sa première pièce, la magistrale chaise longue Pi, il s’agit pourtant d’un réel engagement et d’un renversement assigné à la position du créateur. Et c’est sous cet intitulé emprunté à une déclaration presque provocante de Martin Szekely qu’est présenté son travail au Centre Pompidou. Cette exposition rassemble une vingtaine de pièces de mobilier et une vingtaine de produits industriels réalisés après cette prise de position de 1996. Son travail s’impose au regard, semble couper court à tout commentaire et ne vouloir solliciter ni notre imaginaire, ni notre goût de la nouveauté, ni même les ressorts de la séduction.

Né en 1956 et formé aux Écoles Boulle et Estienne, Martin Szekely se fait remarquer avec sa première collection de meubles, intitulée « Pi » et développée entre 1982 et 1985 grâce à une carte blanche du VIA (Valorisation de l’innovation dans l’ameublement). La collection comporte notamment l’emblématique chaise longue Pi. Depuis lors, sa production se répartit en deux ensembles apparemment distincts mais effectivement reliés par une approche commune. D’un côté, les éditions en petite série de meubles et d’objets destinées à des collectionneurs et commanditaires privés, régulièrement exposées en galerie. De l’autre, des produits et réalisations destinés au plus grand nombre, issus de son travail avec les industriels et de ses commandes publiques.

« Ne plus dessiner », c’est signifier un retrait face à l’emballement de la consommation effrénée de biens et de signes, mais c’est plus profondément et en premier lieu le refus affirmé de mettre en avant son moi, sa propre subjectivité, c’est faire le choix de ne plus s’appuyer sur celle-ci en tant que moteur de création. Il s’agit pourtant d’un réel engagement, mais aussi d’une volonté de renverser la position du créateur. Ne plus s’exprimer en tant qu’auteur permet de mettre en évidence ce que Martin Szekely appelle « les pierres dures » qui constituent le propre des objets : « origine, définition, mise en œuvre et destination ».

Ce travail de mise à distance et d’analyse permet de révéler, en creux, ce que sont les objets : la permanence de leurs nécessités objectives, supporter et contenir, associées à des valeurs plus subjectives et symboliques relatives aux usages et coutumes. Il s’agit dès lors de les faire exister grâce aux matériaux et aux techniques d’aujourd’hui. Entre la neutralité de leur définition et l’impersonnalité des technologies qui nous sont communes, chaque nouvelle pièce lance un fil tendu à l’extrême.

Écartant tout ce qui risquerait d’en rompre l’équilibre, cette méthode de création, au plus juste, où rien ne peut être rajouté ou retranché, laisse l’objet disponible pour tous les usages, pour toutes les formes d’appropriation et de jouissance offertes au destinataire : une économie, dont la dimension éthique génère in fine la dimension esthétique.

Le travail de Martin Szekely nous conduit à nous interroger sur la place qu’occupent les objets non seulement dans nos vies ordinaires mais aussi sur la scène de l’art. Pierre Staudenmeyer avance à ce sujet : « Les meubles occupent un terrain humble sur le territoire de l’art, à cause de leur implacable appartenance à la fonctionnalité et pourtant par là même, ils ont un pouvoir que les œuvres d’art n’ont pas. ». Il s’agit alors, pour chaque objet réalisé avec des matériaux et des techniques d’aujourd’hui, de demeurer au plus proche de ces définitions fondamentales.

Mettant en rapport textes et objets, cette exposition permet d’approcher les fondements d’une démarche singulière et d’en constater les effets sur les réalisations antérieures. Un film de Mark Lewis, réalisé pour cette occasion, apporte une contribution majeure à cette tentative d’élucidation du sens d’une œuvre qui s’impose tout en restant énigmatique.

Exposition « Martin Szekely. Ne plus dessiner », 12/10/2011 – 02/01/2012, MNAM/CCI, Centre Pompidou, Paris, Galerie du Musée
Photographie Georges Méguerditchian
Exposition « Martin Szekely. Ne plus dessiner », 12/10/2011 – 02/01/2012, MNAM/CCI, Centre Pompidou, Paris, Galerie du Musée
Photographie Georges Méguerditchian